Témoignage : avoir un autre enfant après une dépression post-partum ?

En pleine dépression post-partum, Maman S. est retombée enceinte par surprise. Un chamboulement énorme pour cette maman qui ne voulait pas revivre ces moments difficile, elle nous raconte : 

J’ai toujours rêvé d’être maman. Petite fille, je jouais à la poupée comme toutes les petites filles. Ado je pensais que je serais maman tôt. Mes cousines plus âgées commençaient à avoir des enfants et ça avait l’air si simple et si gratifiant. J’ai rencontré celui qui allait devenir mon mari à 16 ans. On s’est marié au bout de 7 ans et malgré un projet professionnel qui stagnait de mon côté, nous nous sommes lancés dans l’aventure.

Beaucoup d’angoisse de mon côté pendant cette attente du test positif qui paraissait interminable et qui n’a pourtant duré que 2 cycles (4 mois en tout). Un plus, une grossesse parfaite. Nous choisissons de ne pas connaître le sexe. Tout allait bien ! Le jour de l’accouchement, j’ai des douleurs pas vraiment régulières, pas vraiment horribles. J’en parle à mon mari. J’appelle ma maman (qui vit à 900km) et puis on se rend compte que ce sont des contractions. Cela dure mais je gère. Par sécurité, nous allons à la maternité parce que nous vivons à 40 min de là.

Arrivés là-bas, plus rien ! Je passe un monitoring. Mon col est à 2. Pfff quelle déception ! Et puis… je perds les eaux. On va m’installer dans une chambre et puis le travail s’accélère. En 1 heure, je passe à 10 et j’arrive dans un fauteuil dans la salle d’accouchement. Il me faut pousser, sans péridurale. J’ai peur ! Notre fille nait. Elle est magnifique mais elle me semble étrangère. J’étais sure d’attendre un garçon (pourquoi je ne sais pas). C’est là que les difficultés commencent. Cet accouchement n’était pas comme je l’imaginais. Il a été douloureux. 3 ans plus tard, je m’en souviens encore.

Le séjour à la maternité est difficile. Je suis fatiguée, traumatisée par cet accouchement. Un psy vient me parler. Il me conseille de me reposer. J’écoute mais je n’en ferai rien. Je recherche la perfection… Le retour à la maison se fait de la même manière. Je suis épuisée par les tétées nocturnes, par ce bébé qui pleure toujours. Je consulte un médecin pour elle sans comprendre que le problème vient de moi. On me prescrit les séances de rééducation du périnée. Par hasard j’appelle une sage-femme du coin.

temoignage depression post partum

Celle de mon suivi à la maison après la naissance ne me convient pas. Elle n’écoute pas, a 8 enfants et pour elle tout est facile alors que pour moi… non… La sage-femme me fait parler, me fait pleurer. J’ai mal et je m’en rends compte. Notre fille a déjà 5 mois et je n’ai jamais pu en parler. Je mets toujours mes pleurs sur le compte de la fatigue. C’est normal non quand on vient d’avoir un bébé ? oui… et non ! Un jour, elle me parle de dépression post-partum. Je nie. Je ne peux pas être comme ça. Je veux être une maman qui gère, une maman parfaite ! En fait, elle a raison. Après plusieurs discussions, je prends mon courage et j’appelle la psy qu’elle m’a conseillée.

La 1 ère séance est difficile, je pleure, beaucoup. J’ai honte, je culpabilise. Je suis la mère que je ne voulais pas être. Je ne suis pas sure d’aimer ma fille. Je regrette parfois de l’avoir. C’était plus simple AVANT. Je n’aurais jamais de deuxième enfant. Je commence à aller mieux 6 mois plus tard mais un nouveau coup dur vient me rattraper. Nous apprenons que mon père est gravement malade.

Mon projet professionnel aboutit enfin ! Enfin une lumière dans ces derniers mois bien sombres. Peu de gens savent que je souffre de dépression post-partum. Alors que les médias, les livres, les articles que nous lisons partout parlent tous des mamans épanouies, de la beauté de la maternité, je ne suis que l’inverse. J’ai peur de me retrouver avec ma fille. Je me sens nulle dans mon rôle de maman.

Peu après, j’ai un retard de règles alors que j’ai un stérilet. Sans doute trop de stress… Un test s’impose tout de même. POSITIF !!! OH non ! Je ne veux pas revivre ça. J’ai déjà tout gâché avec mon aînée. Et papa qui est malade… Drôle de surprise ! Je vois mon gynéco : pas d’erreur. Bébé est bien là, au bon endroit. Mon stérilet a bougé. Je suis en colère ! Pourquoi ? Pourquoi à moi ? J’ai déjà tellement merdé à la naissance de ma fille. Pourquoi recommencer ?

Mon père nous quitte. La maladie a eu raison de lui. Sa dernière parole sensée vers moi sera « Ne perds pas ton bébé à cause de moi. » Il l’aimait déjà tant ce bébé. Et moi ? Je n’en sais rien. Tout en faisant mon deuil, j’ai appris à l’aimer. J’ai toujours cette part en moi qui me dit qu’il m’a été envoyé par mon père. La grossesse s’est moins bien passée que la première. Beaucoup plus de fatigue, de contractions, de risque, d’arrêts de travail… et puis l’accouchement. Après deux semaines de faux travail, le vrai a enfin démarré. Tout s’est bien passé (avec une péridurale). Notre seconde fille est née.

Ce bébé, je ne l’attendais pas mais il m’a réconciliée avec l’accouchement et avec mon rôle de maman. C’est un bébé encore plus difficile que la première (que tout le monde trouvait facile en fait). Mes séances chez la psy continuent. J’ai appris beaucoup sur moi et sur mon grand manque de confiance en moi. La psy m’a expliquée que ma dépression venait de là. J’avais beaucoup idéalisé le rôle de maman.

Aujourd’hui, je vis toujours dans cette culpabilité des débuts avec ma première fille. J’apprends à la gérer. Je m’octroie du temps pour moi c’est important. Je sors avec mes filles, sans mes filles, avec une fille et pas l’autre, toute une organisation à trouver. J’essaie aussi de moins rechercher la perfection.

Alors pourquoi cet article ? Parce que j’ai eu honte et qu’aujourd’hui je veux faire passer un message à toutes ces jeunes ou futures mamans qui se sentent mal par rapport à ce qu’elles ressentent. La grossesse et la maternité sont de gros chamboulements dans nos corps mais aussi dans notre esprit. Nous avons le droit de vivre mal certaines choses et ce qui est important c’est d’en parler. Mon mari n’a pas compris. Je pense qu’il ne comprend toujours pas. J’ai trouvé quelqu’un qui a su m’écouter et je ne serais jamais assez reconnaissante envers cette sage-femme qui a su trouver les mots pour m’aider.

Merci à Maman S. pour son témoignage !

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2 Comments
  • Laurène
    mai 6, 2016

    Merci pour cet article. J’ai accouché il y a bientôt 2 ans, et sors seulement d’une dépression post partum.
    Je me suis complètement retrouvé dans ce texte, et je ne cache pas que ça m’a aussi chamboulé. La mère parfaite idéalisé est aussi pour beaucoup dans mon parcours malheureux.
    Si j’avais une chose à rajouter, c’est qu’il ne faut pas se cacher il ne faut pas avoir honte de ce que l’on ressent, une partie du chemin de la guérison (et de la comprehension) réside la dedans
    Belle journée

  • Marie A
    mai 6, 2016

    Un beau récit qui est tellement vrai. Gros bisous ma belle et tu es une super maman