L’accouchement, plus beau jour de notre vie ?

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La semaine dernière Maman D. nous racontais ce qu’elle avait trouvé pénible dans sa grossesse ici, aujourd’hui elle nous raconte son accouchement. On dit souvent que c’est le plus beau moment de notre vie. La fin sans hésiter, mais alors ce qui a précédé …

Lorsque je repense à mon accouchement, il y a fort fort longtemps, 18 mois pour être précise, je ne peux m’empêcher de sourire avec nostalgie et bienveillance.

AHAHAHAHAHAHAHAHAH.

Ceci est un odieux mensonge.

C’était un lundi, le 16 mars 2015. Une contraction m’a réveillée avec violence à 9h du matin. Enfin « violence » selon mon échelle de douleur à l’instant T, vous comprendrez que ce que j’appelle « violence » à ce moment-là, n’était que du pipi de chat comparé à la suite. Bref, n’allons pas trop vite dans nos réjouissances. Je me réveille donc avec cette douleur qui ressemble beaucoup à celle que l’on ressent lors de règles très douloureuses. Panique à bord. Dans la bataille de sentiments qui fait rage en moi à ce moment, un seul prédomine : l’appréhension. Je ne me sentais plus du tout mais alors PLUS DU TOUT prête à accueillir mon fils. La chambre était finie, j’avais même collé de minuscules petites étoiles phosphorescentes au plafond pour que ça fasse joli. 173 étoiles. Que j’ai collé une par une, c’est dire si j’étais prête ! Mais là, avec cette douleur bien réelle, toute mon assurance s’est effondrée. Allais-je être à la hauteur ? Serais-je une bonne maman ? Et si c’était un petit con ? Et s’il était… moche ?

Alors j’ai tenté de retarder l’échéance par tous les moyens. Je voulais qu’il reste dans mon ventre ce môme, il était bien au chaud, nourri, logé, blanchi, je ne vois pas ce qu’il venait faire dans ce bas monde ! A chaque contraction, je notais l’heure sur mon téléphone, pour me rendre compte de leur fréquence, comme un compte à rebours… tic tac, tic tac… J’ai tenu la journée entière comme ça, je n’ai pas prévenu mon homme, j’ai fait mon ménage et j’ai déjeuné tranquillou, en me tordant de douleurs toutes les 20 minutes tout de même.

enceinte

Petite aparté : En vivant tout ça, je me suis rendu compte que nous les femmes, sommes quand même de sacrés warriors. Rendons nous hommage car nous le méritons. Fin de l’aparté.

Bref, quand l’homme est rentré du boulot, je lui ai dit calmement : « IL ARRIVE ! OK ?! IL ARRIVE ! DEPUIS CE MATIN IL ARRIVE BORDEL!!! » Voilà. Calmement. J’ai vu l’effroi traverser son regard, ce qui veut dire que lui aussi a paniqué, même s’il le nie aujourd’hui, je ne suis pas folle j’ai bien vu son œil friser sévèrement. Il m’a demandé le détail des contractions et quand je lui ai dit qu’elles étaient espacées de 5 minutes, il s’est dirigé vers la chambre pour récupérer ma valise : « Allez go, on y va ! » me dit-il. Mais non. La même panique m’a prise aux tripes. Je lui ai répondu « Promis, à la prochaine contraction on y va, je ne veux pas qu’à la maternité ils me fassent revenir à la maison, imagine c’est trop tôt ! »

Excuse de merde, je vous l’accorde.

Et bien croyez-le ou non mais la prochaine contraction n’est arrivée que 40 minutes après. 40 MINUTES ! Comme quoi, le mental tout ça tout ça… Et c’était une mini contraction même pas douloureuse donc j’ai dit « FAUSSE ALERTE, CELLE-CI ELLE NE COMPTE PAS ! » toujours très calmement, vous l’aurez compris. L’homme, un peu perdu, a attendu que je me décide à bouger. Chose que je n’ai évidemment pas fait. Au contraire, je me suis allongé sur le canapé. Il s’est assis à mes pieds, et m’observait du coin de l’œil.

Soudain une violente contraction me prend en traitre.

Et là. ET LÀ. Vous voyez un ballon de baudruche rempli d’eau qu’on vient fendre d’un coup de cutter ? Et bien pareil. Tout pareil. Une sensation unique et absolument horrible. Je me suis redressée d’un coup. La flaque qui s’était formée sur le canapé (en cuir heureusement) n’étant pas assez évidente, je hurle « ÇA COULE !!!!! » Mon homme a bondi sur moi et a déclaré « BON LA ON BOUGE ON BOUGE ON BOUGEUUUH ! » en m’aidant à me lever. C’est alors que la pire de toutes les douleurs de la terre entière du monde de l’univers m’a littéralement déchiré le bas ventre. J’ai été obligée de baisser les yeux pour vérifier qu’un couteau n’était pas venu se planter par inadvertance. C’est dire le niveau de douleur. Autant les contractions de la journée n’étaient pas une partie de plaisir, autant une fois la poche des eaux rompue, BORDELDEMERDE, une horreur.

pertedeseaux

Le pire c’est qu’à partir de ce moment elles se sont enchainées à une vitesse inhumaine, je n’avais pas le temps de me remettre d’une contraction que la prochaine pointait déjà. Mon homme m’a installée dans la voiture et a démarré en trombes. Nous habitions à 10 minutes en voiture de la maternité, et à cette heure-là (il était minuit passé) il n’y avait quasi personne sur la route. Dans la voiture, je n’avais même plus la force de hurler, je n’ai jamais vu mon mari aussi flippé de tout ma vie, il a roulé si vite qu’en 3 contractions nous étions arrivés à la maternité. Une fois sur place j’ai dit bonsoir à la sage-femme. Enfin j’ai dit bonsoir à ma manière, c’est-à-dire que j’ai hurlé  « PERIDURALE ! » avant de m’effondrer sur mon homme pour me préparer à la prochaine contraction.

A ce stade-là, je ne pensais qu’à une chose. Vous voyez dans les films de guerre, quand un soldat est mortellement blessé et que son pote s’acharne à le trainer sous le feu des balles ? A un moment donnée, le soldat blessé lui murmure « John, laisse-moi… Je vais te retarder… Va, accomplis ton destin… embrasse Martha pour moi, dis-lui que je l’aime… ». Et bien j’étais ce soldat. Je voulais m’allonger sur le sol de la clinique et me laisser dépérir dans ce couloir interminable qui devait me mener à la salle d’accouchement. Quand je dis « interminable », il devait faire à peine 3 mètres, mais dans le feu de l’action je l’assimilais au couloir de la mort.

dying

Mon homme me trainait plus qu’il me soutenait, et m’encourageait : « allez ma dinde, tu vas bientôt souffler, la péridurale va te faire du bien tu verras ! » ce à quoi la sage-femme a répondu : « Attendez attendez, on va voir si l’anesthésiste est disponible déjà, ce qui n’est pas garanti !».

Quoi ? QUOI ? KOUAAAAA ?????

Au bord de la crise de nerfs j’ai dit « c’est soit il est dispo soit vous me laissez mourir ici ok ? IL EST HORS DE QUESTION QUE CE MERDEUX ME DECHIRE LES ENTRAILLES SANS PERIDURALE OK ? OK ? OOOOKKKKK ???? » La sage-femme m’a alors aidé a monté sur la table d’accouchement et m’a examiné, « Vous êtes à 3 ! » me dit-elle, « j’ai peur que ce soit un peu limite pour la péri, je vais voir ! » et elle s’en est allée illico. Je me suis alors tournée vers mon mari, je l’ai chopé par le col de son t-shirt et je lui ai dit « écoute moi bien, encore une contraction et je meurs tu m’entends ??! Et tu devras élever ce gamin tout seul ! Donc débrouille-toi mais je veux cette putain de piqure !!!! »

accouchement

Sur ces sages paroles, l’anesthésiste est entré. A cet instant il y avait un halo de lumière autour de sa tête, tel un Jésus apparaissant après sa résurrection. J’ai enfin eu droit à ma péri, et 20 minutes plus tard, détente. C’était magique. La sage-femme m’a examiné de nouveau et a prévu un accouchement autour de 9h du matin.

Finalement mon fils est né à 4h20. En 4 poussées il était là, tout beau, tout rose, les yeux grands ouverts… Alors je ne vous sortirais pas la phrase bateau : « on oublie toute la douleur à la seconde même où on porte son enfant dans ses bras ». C’EST FAUX. Comme le disait Hélène Segara : on n’oublie jamais rien, on vit avec. Mais quand il a accroché mon regard, il m’a fixé longtemps. Je suppose qu’il ne voyait pas grand-chose, en tout cas cela devait être flou ou en noir et blanc ou je ne sais pas comment voit un bébé vieux de quelques heures… mais quand il m’a fixé, ça m’a intimidé.

Et j’ai dû détourner les yeux tellement c’était intense.

naissance

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1 Comment
  • ptitebean
    octobre 4, 2016

    Super cet article ! Et complètement vrai “On n’oublie jamais rien, on vit avec”