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Grossesse extra-utérine : Laëtitia nous raconte…

Parce qu’en temps de confinement, on ne parle que de ça, j’ai pensé qu’il serait aussi sympa de continuer notre séries de témoignages. Parce que la vie continue, et qu’il faut la faire continuer quoi qu’il arrive. Aujourd’hui c’est de grossesse extra-utérine qu’on parle. Laëtitia nous raconte comment elle a vécu la situation. Car pour elle ce fut un double choc. Je vous laisse découvrir son histoire…

“Tu sais, si t’as envie de dire quelque chose au monde, fais-le. Ne te soucie pas du regard des autres.”

Et bien, j’ai envie de vous parler de ce mois de septembre. Où mon âme, mon mental et mon corps ont été charcutés à vif.
Donc si vous ne voulez pas rentrer dans ma vie intime et mon univers passez votre chemin. Car je me mets complètement à nue.
Je venais d’apprendre cinq jours avant, que dans mon corps , un petit être poussait. Mais ce matin là, tout s’est brisé.
Cette douleur quand je me suis réveillée pour me préparer avant d’aller au boulot.
Je me suis dis que je suis forte, “c’est bon ça va aller, je suis pas une chochotte” mais bon j’ai quand même mal…
Puis ce truc, tu sais, cette sensation que quelque chose ne va pas. Et là, quand dans la voiture, tu hurles de douleur, les larmes ne font que de couler, j’ai vu cette femme dans sa voiture choquée et paniquée de me voir dans cet état.
C’est pas normal ce qui se passe… et dans ma tête, je  repense à cet article que j’ai lu il y a une ou deux semaines avant…

La grossesse extra-utérine…

C’est la panique. Mais mon but à ce moment là, c’était d’arriver au boulot…. Pourquoi ? Je ne sais pas. Et les urgences ensuite. Mais surtout !!!! Arriver au boulot… Comme quoi, notre cerveau nous fait penser à des choses vraiment débiles dans ces situations d’extrême urgence.
J’arrive enfin à l’hôpital. Le pire endroit. Là, j’ai peur. Peur pour ce petit être et d’un coup peur pour toi… De t’annoncer que je suis à l’hôpital. Que quelque chose ne va pas. Surtout que tu avais bossé cette nuit. Quand tu arrives, je vois la panique et l’incompréhension.
Un long moment d’attente. Et à ce moment, je me suis senti seule au monde. Seule avec toutes mes sombres pensées… Seule face à moi-même et cette idée que quelque chose en moi est entrain de se briser.
Puis arrive le côté froid, aseptisé et dur du monde médical. Prise de sang, une tonne de questions, puis pour mon cas…

L’échographie.

Le medecin regarde l’écran mais elle ne comprend pas. Elle voit bien quelque chose mais ne comprends pas pourquoi j’ai mal. Puis un truc noir en haut à gauche.
Il faut un deuxième avis médical.
Et là, toi et moi on pense à la même chose. Le deuxième avis médical confirme notre pensée. Douche froide. Grand choc.

Je fais une grossesse extra ET intra-utérine.

C’est à dire que j’ai un bébé dans l’utérus et un autre dans un endroit qui n’est pas du tout prévu à cet effet et pour mon cas, c’était ma trompe gauche.Donc pas un bébé, mais DEUX. Des jumeaux.Plus tard, j’apprends qu’une grossesse extra-utérine c’est 25% des cas et une grossesse extra ET intra-utérine c’est seulement 5% des cas.
Deuxième douche froide. Je dois être opérée en urgence. La trompe a explosé, je fais une hémorragie interne. A cet instant, mon corps ne m’appartient plus du tout. Tout le monde court dans tous le sens.
Je me rappelle, que l’infirmière qui s’était occupée de moi était vraiment douce, et se sentait vraiment mal pour nous. Elle voyait notre détresse. Et elle a voulu m’accompagner aussi longtemps que possible. 
Et aussi, dans cette salle de réveil ou j’ai dû attendre qu’on m’emmène au bloc. Cet infirmier… qui s’est arrêté de s’occuper des autres patients pour prendre ma peine, ma peur, mes doutes et mes larmes. Merci à lui de m’avoir dit que j’avais le droit de pleurer, de parler. Qu’il était là pour ça et qu’il resterait tant que j’en ai besoin.

Je n’ai jamais autant pleuré je crois.

Car à ce moment là, je n’avais pas peur pour moi. Mais pour mes bébés. Savoir si le deuxième allait tenir le coup.
Puis le bloc. À cette infirmière qui m’as tenu le masque pour que je m’endorme. Je suis désolée de lui avoir fait de la peine. Car je me suis mise à pleurer et elle ne savait pas quoi dire pour me consoler. À part « Je suis désolée, ça va aller…»
Après cette aventure au bloc, le retour dans la chambre. Je vous avoue que le souvenir que j’ai est assez nébuleux… Sauf toi. Te voir , voir ta détresse, ta douleur, la peur. Encore aujourd’hui je suis désolée de ce que je t’ai fait vivre. Je suis désolée que tu aies eu cette peur que je meure…
Car oui une grossesse extra-utérine c’est dangereux ; voire mortel.
Je l’ai réalisé bien plus tard et encore des fois je préfère oublier ça.
Après ce passage, malheureusement, j’ai perdu le deuxième bébé. Et il ne me reste plus qu’une trompe. L’autre a été retirée.

Puis, il faut ajouter à tout cela, les cicatrices.

Maintenant j’ai sur mon corps des cicatrices qui ne me feront jamais oublier cette histoire. Pendant longtemps, j’ai eu l’impression que ce n’était plus mon corps. Le corps d’une autre.
Cela fait maintenant 18 mois. Je voulais écrire ce qui m’est arrivé, car déjà le dire, c’est l’accepter, et faire son début de deuil. Je voulais l’écrire car je me dis que peut-être, comme moi, quelqu’un qui vit la même expérience, après m’avoir lu, réalise, se dise la même chose que moi ; que c’est peut-être de ce mal dont elle souffre et qu’il ne faut pas attendre pour aller à l’hôpital. Je voulais l’écrire, pour que toi ou quelqu’un d’autre se sente moins seule… Car savoir qu’une autre personne l’a vécu, ça aide. 

À toi.

Je suis vraiment désolée de tout ce que tu as pu vivre à ce moment là. Car tu l’as vécu et subi différemment de moi. Malgré cette épreuve, on s’aime encore plus. On s’est retrouvés encore plus soudés qu’avant.
Je t’aime.